Veille juridique

Le statut des stock-options : bien propre ou bien commun aux époux

Publié le : 20/06/2024 20 juin juin 06 2024

La stock-option est une option d'achat, utilisée par les entreprises comme forme de rémunération variable allouée par les actionnaires aux dirigeants et aux salariés. Mais comment les stock-options sont-elles valorisées dans le patrimoine du bénéficiaire ? Et quel est leur statut dans la communauté des époux ? Doivent-elles être intégrées à l’actif commun lors de la procédure de liquidation d’un divorce ? Voici toutes les réponses à vos questions.  

 

Définition d’une stock-option 

 

Les stock-options constituent un élément de rémunération, permettant à un salarié de souscrire ou d'acheter des valeurs mobilières de son entreprise à un prix généralement bas. En pratique, l’employeur propose à ses salariés de souscrire des actions à un prix donné, pendant une période déterminée. S’il lève l’option, sa rémunération découle de la différence entre le prix d'achat initial, lors de la levée d’option, et le prix de revente.  

La stock-option est une simple option d’achat. Son bénéficiaire est donc titulaire d’un droit d’option et ne devient propriétaire des actions qu’au jour de cette levée d’option qui constitue la date d’acquisition. C’est la plus-value, c’est-à-dire la différence entre le prix de souscription et le cours réel de l’action qui constitue une rémunération (exonérée d’impôt lorsque le salarié conserve les actions pendant cinq ans sous la forme nominative).  

Se pose alors la question de savoir si cette rémunération entre dans la communauté des époux au même titre que les autres. Or, il existe une nuance soulevée par la jurisprudence. 

 

La répartition des biens dans le régime légal de la communauté 

 

La signature d’un contrat de mariage avant l’union n’est pas systématique, même si elle est fortement conseillée dans certaines situations patrimoniales. Sans contrat de mariage, les époux sont soumis au régime légal de la communauté aux acquêts. Il est essentiel de différencier les deux types de biens existant au sein d'un couple marié sans contrat de mariage : les biens communs et les biens propres. Les biens propres, acquis avant l’union, appartiennent personnellement aux époux. Par opposition, tous les biens acquis à compter du mariage entrent dans la communauté formée par les deux conjoints, même s’ils sont financés par un seul des deux époux.  

Chacun de ces biens est soumis à un régime juridique spécifique, d'où la nécessité de les définir clairement. Le bien commun peut être : 

  • Un bien acquis à titre onéreux pendant le mariage ; 

  • Un revenu généré par un bien commun ; 

  • Un revenu généré par un des biens propres d’un époux.  

Entrent donc dans les biens de la communauté des époux les loyers, les intérêts des placements, et même les salaires tirés de l'activité professionnelle des époux. Dans une affaire portée devant la Cour de cassation le 25 octobre 2023, la question se posait justement de savoir comment les stock-options données à l’un des époux en tant que rémunération entraient dans la communauté.  

 

Les stock-options entrent-elles dans la communauté des époux ? 

 

Pendant longtemps, la doctrine a soutenu que les stock-options acquises par l'un des conjoints étaient considérées comme des acquêts et par conséquent comme des biens communs. C’est une question prend tout son sens lorsqu’on procède au partage de la communauté en raison du divorce des époux. 

Or, dans un arrêt en date du 9 juillet 2014, la Cour de cassation rompt avec cette vision doctrinale. Les juges considèrent que les options non exercées avant le divorce des époux mariés sous le régime de la communauté, constituent des biens propres par nature en application de l’article 1404 du Code civil. Une jurisprudence confirmée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 25 octobre 2023 à propos de stock-options détenues par l’époux, non encore exercées au moment de son divorce. La cour confirme la décision de première instance d’exclure ces stock-options du patrimoine commun des époux.  

Dans ce cas d’espèce, l’époux marié sous le régime de la communauté souscrit des stock-options et achète, en exercice de ses droits, soixante-huit actions. Au moment du divorce, se pose la question si ces actions entrent dans la communauté des époux. Lors de la liquidation et du partage de la communauté, seule la valeur des actions levées doit être comptabilisée dans l’actif commun.  

 

Le caractère incessible et personnel des stock-options 

 

La Cour de cassation considère que les options de souscription, ou stock-options, ont un caractère personnel. Elles forment des biens propres par nature avant leur levée, en raison du principe d'incessibilité des stock-options jusqu'à ce que l'option ait été exercée. Conformément à l’article 1404 du Code civil, les droits attachés exclusivement à la personne forment des créances incessibles et donc des biens propres par nature.  

Toutefois, l’incessibilité cesse au moment de la levée d’option. Les stock-options deviennent des biens communs. Mais seules les actions acquises en exercice de ces options d’achat pendant le mariage entrent dans la communauté. Les options qui n’ont pas été exercées restent donc dans le patrimoine propre et lorsque l’option est exercée après la dissolution de la communauté, l’action est un bien propre qui n’entre pas dans l’indivision post-communautaire 

C’est la raison pour laquelle la Cour de cassation rejette le pourvoi et estime que la cour d’appel a justement retenu que seules les 68 actions levées par l’époux au jour de l’ordonnance de non-conciliation doivent être intégrées à l’actif de la communauté. La qualité d’associé et les droits sociaux qui y sont attachés appartiennent à l’époux qui fait l’acquisition des parts sociales. C’est donc uniquement la seule valeur patrimoniale des parts souscrites par l’époux en cours d’union qui sera considérée comme commune. 

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